Un nouvel archevêque à Baltimore : une nomination à suivre…

Publié le par Daniel HAMICHE

archbishop.jpgJusqu’ici Ordinaire militaire pour les États-Unis, Mgr Edwin Frederick O’Brien a été nommé par le Souverain Pontife, le 12 juillet dernier, quinzième archevêque de Baltimore (Maryland) en remplacement du cardinal William Henry Keeler, dont la « renonciation à la charge pastorale du diocèse a été acceptée pour limite d’âge ». Âgé de 76 ans, archevêque de Baltimore depuis 1989, le cardinal Keeler venait, voici quelques semaines, de subir une intervention chirurgicale au cerveau conséquence d’un traumatisme crânien subi lors d’un accident de voiture survenu l’an passé en Italie. Le nouvel archevêque sera installé le 1er octobre prochain (j’aurai moyen de m’en souvenir puisque je fêterai ce jour-là mes 60 automnes…).
La presse progressiste de Baltimore essaie de se rassurer : « L’héritage de Keeler sera maintenu » titrait le Baltimore Sun du 12 juillet. Je n’en jurerai pas, car l’ancien archevêque et le nouveau ne présentent pas exactement le même “profile”, Keeler passant, non sans raison, pour un progressiste.
Le diocèse de Baltimore fut érigé canoniquement le 6 novembre 1789. C’est le premier diocèse fondé aux États-Unis et donc le « berceau » (cradle en américain) ou « Premier Siège » (Premier See) du catholicisme américain. John Carroll, préfet apostolique depuis 1784, fut nommé évêque le jour de l’érection du diocèse qu’il dirigera jusqu’à son décès survenu en 1815, avec une juridiction s’étendant aux treize États de la jeune union et aux missions extérieures. Selon John Carroll, les États-Unis comptaient, en 1789, moins de 30 000 catholiques pour une population totale évaluée à 4 millions d’habitants : 15 800 catholiques dans le Maryland (dont 3 000 esclaves Noirs), 7 000 en Pennsylvanie, 1 500 à New York et environ 200 en Virginie. L’énorme diocèse de Mgr Carroll ne disposait alors que d’une douzaine de prêtres… Deux anecdotes qui ne manqueront pas d’intéresser mes aimables lecteurs : John Carroll fit l’essentiel de ses études en France au collège des Jésuites de Saint-Omer, dans les Flandres françaises ; le troisième évêque de Baltimore fut un Français : Ambrose Maréchal, des prêtres de Saint-Sulpice, qui fut nommé le 14 juillet 1817 (voici donc 190 ans jour pour jour…) : il décéda, dans sa charge épiscopale, le 29 janvier 1828.
Mais revenons à Mgr O’Brien.
L’archevêque est né dans le Bronx, à New York, le 8 avril 1939. Il fut ordonné prêtre pour l’archidiocèse de New York le 29 mai 1965, dont il deviendra évêque auxiliaire le 6 février 1997, au titre de Thizica (in partibus). Le 7 avril suivant, il est nommé coadjuteur de l’Ordinaire aux Armées, Mgr Joseph T. Dimino, auquel il succédera le 12 août de l’année suivante, l’Ordinaire aux Armées ayant démissionné pour des raisons de santé. Mgr O’Brien fut successivement chapelain de l’Académie militaire de West Point puis au Viet-Nam de 1971 à 1972. En 1973, il quitte l’Ordinaire aux Armées pour passer son doctorat à l’Angelicum de Rome et obtient, pendant ses études, un diplôme du Pontifical North American College (le séminaire américain de Rome). Il travaille la théologie morale et écrit sa thèse sur « L’origine et le développement des principes moraux dans les écrits de Paul Ramsey » (1976). De retour aux États-Unis, il devient vice-chancelier de l’archevêché de New York et vicaire de la cathédrale St. Patrick. En 1979, il coordonne tous les événements liés à la visite de Jean-Paul II à New York et devient le directeur de la communication de l’archidiocèse. En 1986, il est nommé prélat de Sa Sainteté et dirige comme recteur, à deux reprises, le séminaire St. Joseph (1985-1989 et 1994-1997). Entre temps, de 1990 à 1994, il sera le recteur du North American College de Rome. Le 6 février 1996, Monsignore O’Brien était nommé archevêque auxiliaire de New York.
De septembre 2005 à juin 2006, outre sa charge d’Ordinaire aux Armées, il est le coordinateur du Saint-Siège pour la visite apostolique des 229 séminaires et maisons de formation religieuse aux États-Unis.
On ne reparlera pas ici dans le détail de la tragédie des « abus sexuels » du clergé américain, dont j’ai déjà traité ad nauseam… Mais le choix de Mgr O’Brien, pour cette tâche ingrate (mais ô combien nécessaire), était évidente pour le Saint-Siège. Plusieurs mois avant que la Congrégation pour l’éducation catholique ne publie sa célèbre Instruction sur les critères de discernement vocationnel au sujet des personnes présentant des tendances homosexuelles en vue de l'admission au séminaire et aux Ordres sacrés,  du 4 novembre 2005 [1], Mgr O’Brien avait déclaré au National Catholic Register : « Je pense que quiconque prend part à une activité homosexuelle, ou montre de fort penchants homosexuels, ne devrait pas demander d’entrer dans un séminaire, et ne devrait pas y être admis ». Le rapport de Mgr O’Brien a été remis à Rome l’an dernier, mais il n’a pas encore été publié. Il traite, à ce que l’on en sait, du problème de l’homosexualité et de la préparation au sacerdoce – selon certaines estimations, la moitié des prêtres américains aurait une “tendance” homosexuelle –, mais aussi de l’enseignement hétérodoxe dispensé dans les séminaires.
On imagine la tâche qui attend le nouvel archevêque. Les deux séminaires archidiocésains St. Mary’s Seminary (Baltimore) – le premier séminaire jamais créé aux États-Unis, par le R.P.  Francis Nagot, un prêtre de Saint-Sulpice, le 18 juillet 1791 – et Mount St. Mary’s Seminary (Emmitsburg) – « Cradle of Bishops » (pouponière d’évêques : il en sortit au moins 25… ; également fondé par des Français), n’ont pas une très bonne réputation… Le St. Mary Seminary a été qualifié de « Pink Palace » par Michael S. Rose (l’auteur de Goodbye, Good Men) tant il était “tolérant” pour les séminaristes homosexuels… Avec l’arrivée de Mgr O’Brien, ce temps semble être révolu.
Le nouvel archevêque va devoir administrer un “gros” archidiocèse de plus de 500 000 fidèles répartis en 151 paroisses administrées par 545 prêtres (285 diocésains, 260 réguliers), mais extrêmement “libéral”. Une lourde tâche, disais-je, pour Mgr O’Brien, d’autant plus que se profile, à l’horizon, l’élection présidentielle de novembre 2008 pour laquelle le poids des catholiques sera décisif…


[1]
www.vatican.va/roman_curia/congregations/ccatheduc/documents/rc_con_ccatheduc_doc_20051104_istruzione_fr.html



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